Témoignage de Sophie — Ce n’est pas un métier à faire entre deux couches
Interview menée par Virginie
Virginie : Bonjour Sophie, merci de prendre quelques minutes pour cet échange. Vous aviez postulé il y a quelques semaines pour devenir animatrice en téléphone rose. Est-ce que vous pouvez me raconter ce qui vous a motivée ?
Sophie : Bonjour Virginie. Alors, j’ai trois enfants, dont deux en bas âge, et je suis seule à la maison quasiment tout le temps. C’est vrai que je cherchais un moyen de gagner un peu d’argent sans devoir sortir, sans avoir de contraintes de déplacement. Quand j’ai vu votre annonce, je me suis dit : “Pourquoi pas moi ? J’ai une voix douce, j’aime parler… et puis ça paie vite.”
Virginie : Je comprends la logique. Le téléphone rose, en apparence, c’est tentant pour les mamans à la maison. Mais dans la pratique, comment ça s’est passé pour vous ?
Sophie : Franchement ? J’ai vite compris que ça n’allait pas le faire. Je me connectais le soir, mais mon bébé pleurait, le grand avait la gastro, et ma fille faisait ses devoirs à côté de moi en hurlant parce qu’elle comprenait rien… J’avais à peine mis mon casque que je devais déjà me déconnecter. Ou je laissais le poste ouvert, et personne n’appelait parce que j’étais notée comme “occupée”.
Virginie : Vous aviez du mal à assurer des créneaux réguliers, c’est ça ?
Sophie : Oui. Et je culpabilisais. Je me disais : “Allez, connecte-toi, même si les enfants dorment pas.” Mais ce n’est pas possible. Quand je suis en ligne, il faut que je sois concentrée, dans le bon état d’esprit. Je ne peux pas être sensuelle au téléphone pendant qu’un petit tousse à côté de moi et que je tends l’oreille pour savoir s’il va vomir ou pas…
Virginie : Et vous avez bien fait de me le dire. Parce qu’au fond, ce n’est pas vous le problème. C’est juste que ce métier ne s’improvise pas. On a beau être chez soi, ce n’est pas un job “entre deux lessives”. Il faut une vraie disponibilité mentale et physique, un endroit calme, et surtout… une discipline.
Sophie : Voilà. C’est exactement ça. Je pensais que ce serait souple, mais en réalité, ça demande autant de rigueur qu’un boulot classique. Et avec mes enfants malades, mes nuits coupées, les rendez-vous à l’école… j’ai vite compris que je n’étais jamais vraiment disponible.
Virginie : Et vous avez eu raison de faire ce constat tôt. Parce que forcer, dans ces conditions-là, c’est s’épuiser pour rien, et se mettre la pression pour un résultat décevant. Ce métier peut être très rentable, oui, mais pas dans le chaos. Il faut pouvoir s’isoler, être régulière, gérer son planning. Et ce n’est pas un reproche : c’est juste que ce n’est pas compatible avec certaines périodes de vie.
Sophie : Oui, je crois que je voulais y croire, mais ce n’était pas réaliste. Je suis déjà à bout avec les miens.
Virginie : Alors gardez votre énergie pour ce qui est essentiel, et quand vous aurez un peu plus de souffle, peut-être que ce sera le bon moment. Mais pour l’instant, ce ne serait pas vous rendre service.