Témoignage d’Hélène — Quand l’envie devient un piège
Interview menée par Virginie

Virginie : Bonjour Hélène. Merci d’avoir accepté de témoigner ici. Dites-moi, qu’est-ce qui vous a donné envie de devenir animatrice en téléphone rose ?

Hélène : Bonjour Virginie. C’est très simple : j’ai toujours été une femme… intense. Je ne peux pas passer une journée sans penser au sexe. Chez moi, ce n’est pas un plaisir, c’est un besoin. Quand j’ai vu votre annonce, j’ai tout de suite su que c’était pour moi.

Virginie : C’est vrai que certaines femmes arrivent avec un vrai appétit érotique. Mais dans votre cas, dès le départ, j’ai senti que c’était plus qu’une envie. Je me souviens encore de ce matin-là…

Hélène : (rire nerveux) Oui, je m’en doute. J’étais chez moi, toute seule. J’étais excitée, c’était trop. Je vous ai appelée et je vous ai dit : “Virginie, connectez-moi, connectez-moi tout de suite ! Je suis en feu ! Je dois y aller maintenant, je peux pas attendre !”

Virginie : Et je vous ai demandé de respirer, de vous poser un peu. Parce que ce que vous exprimiez à ce moment-là, ce n’était pas une envie de travailler. C’était une urgence. Une pulsion.

Hélène : C’est vrai. Je respire fort, je perds mes mots, j’ai du mal à penser à autre chose. Je me connecte, je reste en ligne des heures, j’attends les appels comme une droguée attend sa dose. Et quand je raccroche, j’ai déjà envie de recommencer.

Virginie : Et c’est exactement pour ça que je vous ai rappelée. Parce que le téléphone rose ne peut pas être utilisé pour combler un vide aussi profond. Ce n’est pas un exutoire personnel. Ce n’est pas un substitut à une thérapie.

Hélène : Mais ça me fait du bien, sur le moment…

Virginie : Oui. Sur le moment. Mais ensuite ? Vous m’avez dit vous-même que vous pleurez parfois après les appels. Que vous vous sentez seule. Que vous culpabilisez. Ce n’est pas un apaisement, c’est un cycle de manque.

Hélène : Alors vous pensez que je ne devrais pas faire ça ?

Virginie : Je pense que vous êtes en souffrance, Hélène. Et que cette souffrance mérite d’être entendue, mais ailleurs. Le téléphone rose ne peut pas être un terrain de jeu pour quelqu’un qui cherche à calmer une détresse intérieure. Ce n’est pas le bon cadre. Ce n’est pas juste pour vous — et ce n’est pas juste pour les clients non plus.

Hélène : Vous êtes la première à me dire ça aussi franchement.

Virginie : Parce que je pense que vous méritez cette franchise. Vous êtes une femme vivante, entière, mais vous êtes en train de vous faire du mal en pensant que c’est un exutoire. Vous méritez mieux. Vous méritez un vrai accompagnement, un vrai espace pour poser ce que vous traversez. Je vous le dis avec bienveillance : ce métier n’est pas fait pour vous, pas dans cet état-là.

Hélène : Merci… Même si ça me fait un choc, je crois que j’avais besoin de l’entendre.

Virginie : Et je suis là pour ça aussi.